Serais Capitaine disais-je à ma momon… Danseuse étoile chantait en écho ma sœur qui n’en ratait pas une, oui, «comme Dalida». Il est vrai que j’avais déjà une panoplie de zouave, un chapeau de mousquetaire (fabriqué avec des plumes de coq sur une perruque de paille) ! Ma sœur par contre ne possédait qu’une jupe miteuse en rose bonbon ! Alors nous allions au grenier chercher l’inspiration. Il faut dire que pour des enfants de colon, on vivait au cinquième d’une maison à balcon.
Le Grenier… je l’avais inventé : un renfoncement poussiéreux derrière la coiffeuse commode de ma maman ! Michèle y mettait ses Marie-claire (pouf) et autres journaux tendres. Moi ma collection âprement négociée en permanence du fameux illustré «Radar», où des savants relativement fous reconstruisaient la Terre, et même l’Univers ! Chut, top secret. Pas un mot à la reine mère.
Un cafar’nahoum minuscule (at’choum) de vieilles affaires désaimées, d’étoiles de neige ou de mer, voire d’océan, un grenier virtuel mystérieux magique époustouflant…
Les souris, oui, y vivaient tranquilles ! Ma momon, femme d’hier, avait peur de ces petites bêtes ! Ma soeur aussi. J’étais donc maître de ces lieux, tenais la main de la dernière, laquelle faisait semblant -menteuse- de ne pas trembler. Capitaine je me devais de faire la guerre avec panache, pauvres bestioles ! Quand j’en attrapais une à main nue ou par autre stratagème, je la menais dare dare par la queue dans notre vieille baignoire Louis quinze et, sadiquement, j’ouvrais le robinet !
Une souris nage, vois-tu, avec des petites pattes roses comme Dalida. Mais ma sœurette disait tout… à sa maman : guy il est méchant, il noie les souris. Rapporteuse ! Ma mère filait vite faire des courses, mon père travaillait, Michèle devait donc regarder en pleurnichant les coussinets bleu-clair de l’animal qui barbotait !
Il est vrai que les demoiselles pleurent facilement».
Alors, heureux de vivre et pour embêter les voisins sages, je poussais haut et fort le cri tyrolien de Tarzan : « ha ha ha haâ…-hÄn. Des fois je montais sur l’armoire, sautais du haut de l’arbre sur le lit à ressorts, pour épater le monde des souris ?
Kattie, fais-nous de grâce un dessin de lune à paillettes d’or ou de diamant ! Lizette une musique délicieusement amère ! Prima, un poème triste triste triste -ô combien- et charmant ! Hélène un roman russe drolatique fatidique romantique politique, etc ! Alicia, peins je t’en prie, en lettres blondes et rousses de la poussière de lumière ! Margot, la nouvelle, mime une danse guerrière sauvage cannibale pour faire trembler les enfants ! Orfée un sermon du haut de la montagne ou de l’armoire serait le bienvenu, jamais entendu encore ! Ö Betty…Ö… et toi Célange ! Pardon de ne point citer les autres, pardon, une prochaine fois, mon anniversaire est pour bientôt : Toutes et tous sachez que je rendais souvent leur liberté aux nageuses.
Depuis suis devenu vieux sage impénitent. GUY